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LA VIE DE FAMILLE
LETTRE II.


New-York (Amérique), 4 octobre.

Bonjour, ma sœur chérie ! ou plutôt bonsoir sur le continent nouveau où je viens de mettre le pied, après avoir été bercée durant treize jours sur la mer. Je demeure à Astorhouse, l’un des plus vastes et des meilleurs hôtels de New-York ; il contient plus d’habitants que la capitale de l’Islande, environ cinq cents. En face, mais un peu de biais, je vois un grand bâtiment, un soi-disant Muséum, avec drapeaux flottants, des buissons verts sur le toit, et les murs couverts de dessins symboliques représentant « les plus grandes merveilles du monde, » c’est-à-dire les animaux extraordinaires, les hommes phénomènes, que l’on montre dans l’intérieur de l’édifice (j’en remarque un, parmi ces derniers, qui fait la culbute en l’air en sortant de la gueule ouverte d’une baleine, un « salto mortale, » comme feu le prophète Jonas). Ceci et autres objets curieux sont annoncés au dehors par une bande de musiciens placés sur le perron. Ils jouent bien, et c’est en vérité divertissant à voir et à entendre. Devant Astorhouse est un enclos verdoyant, avec arbres et grand jet d’eau, qui rafraîchissent l’air, et je m’y suis ranimée en m’y promenant un moment après le dîner. Astorhouse est situé dans Broadway, rue principale, large et fort passagère, de New-York, où gens et voitures forment un courant et un mélange perpétuel. De longues files à perte de vue d’omnibus blancs et dorés au mouvement égal et rapide, s’avancent mêlés à des milliers d’autres véhicules grands et petits. Les larges trottoirs fourmillent de gens de toutes