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LA VIE DE FAMILLE

pérance pour les personnes dont elles éclairent le travail ; quand on sait que chaque cœur renfermé dans ce palais du travail possède une petite lumière bien nette qui éclaire un avenir de bien-être et de prospérité rapproché de tous par le mouvement de la roue des machines à tisser, alors, en vérité, ces lumières rendaient un témoignage de la chose, et je regardai l’illumination avec un plaisir qui me fit trouver cette nuit d’hiver chaude.

Puis je donnai amicalement la main à une foule de gens, et tins bon jusque fort avant dans la nuit. Le lendemain, j’ai visité la manufacture et vu les « jeunes dames » à leur travail et à leur dîner, leurs dortoirs, etc., etc. Tout était bien et parfaitement conforme à la description qu’on m’en avait faite. Seulement je remarquai que plusieurs des « jeunes dames » approchaient de la cinquantaine, que plusieurs étaient assez mal habillées et d’autres, en revanche, avec trop de coquetterie. Ce qui me frappa surtout, c’est le bon accord des hommes et des machines. Par exemple, j’ai vu des jeunes filles se tenir chacune au milieu de quatre métiers à filer travaillant activement ; aller de l’un à l’autre, les regarder, les surveiller, les soigner à peu près comme une mère soigne et s’occupe de son enfant. Les machines deviennent de plus en plus des enfants obéissants sous les yeux maternels intelligents. La procession des ouvrières en châles, chapeaux et voiles verts, marchant deux à deux pour aller dîner, était jolie à voir ; ces femmes paraissent honnêtes ; elles mangent à de petites tables de cinq à six personnes, et ce qu’on leur donne m’a paru bon et suffisant : j’ai remarqué du lard et des pommes de terre, des tartes aux fruits. Plusieurs jeunes femmes du cercle de la civilisation de Lowell me furent présentées ; quelques-unes étaient re-