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D’un violent effort de volonté, il calma son agitation, mais sous la poigne de fer, son cœur se cabra, révolté, agressif.

Comme un cheval fougueux qui échappe à son maître, et qui après un saut furibond s’arrête devant celui qui voulait le dompter, Paul vit son amour superbe se dresser devant sa raison qui voulait l’étouffer.

Haletant, courbé, les mains crispées au bois de sa table de travail, le mari d’Alix assista au duel en arbitre impuissant.

L’Amour attaqua le premier :

— Tu veux me détruire, ô raison téméraire, où est ta force ? Une maladie te fait sombrer, moi, je ne crains pas la mort…

— Je frappe avec sûreté ; mes calculs sont froids, et j’échafaude avec prudence, rétorqua la Raison.

— Je fais un signe, et les plans conçus par ta sagesse, s’écroulent misérablement. Que peux-tu ! Où j’allume mon brasier, je suis inexpugnable.

— J’ai gagné des victoires sur toi. Je suis devenu maître de plus d’un cœur qui t’appartenait, en te chassant.

— Tu n’es pas devenu le maître de ce que tu croyais. Je brise ce que j’abandonne ; en sortant d’un cœur, j’en emporte la vie.

— Tu te vantes ! Je répare ce que tu as détruit, et le cœur refait à neuf…

— … par tes soins, n’en est plus un.

— Il m’obéit…

— Le cœur qui obéit à la raison, prouve qu’il a perdu son beau titre.