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Sur le silence qui suivit, Béatrice laissa tomber ces mots dits d’une voix très douce :

— Je m’explique mieux la sérénité des personnes qui se retirent du monde ; elles vivent dans la compréhension des œuvres de leur Créateur.

Cette phrase venant de lèvres qui n’étaient habituées qu’à rire, tira Alix de sa rêverie. Surprise, la jeune femme regarda son amie.

— Est-ce bien toi qui viens de parler, Béatrice ?

— Mais oui, c’est moi. Et j’ajoute après monsieur Bordier : malgré cette nature qui nous prêche une harmonieuse entente, nous compliquons notre vie à plaisir. Oh, moi, je veux une vie tout ainsi.

— Je souhaite que ton vœu s’accomplisse, dit Alix émue, en se levant. Allons, nous partons ? Vous êtes prêt, monsieur Bordier ?

— Certainement, Alix, je vous suis.

Mademoiselle Vilet se leva à son tour, et regarda Gilles qui ne bougeait pas.

— Monsieur de Busques reste-t-il ici pour demander à la marée de venir lui lécher les pieds, dit-elle cérémonieuse.

— Hein ? Quoi ? Que me veut-on ?

— Tu dormais, sacripant !

— Oui, et je rêvais. Je voyais une maisonnette, fleurie de glycines, ombragée d’un gros tilleul, et sur le perron, il y avait douze enfants qui me tendaient les bras, oui, douze.

— Grands dieux ! quel rêve ! fit Béatrice en prenant une mine effarée, et as-tu vu la maman de la nichée ?