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As-tu envie de nous rompre le cou ? N’oublie pas que nous voulons aller à Percé Rock Hotel, et non à la morgue.

— Pauvre chéri, tu as peur de mourir. Vois, je ne roule plus qu’à du quarante, par amou… par amitié pour toi.

— Pourquoi avoir changé le mot, Béatrice…

— Alors, par amour pour toi, puisque tu le préfères, dit-elle en regardant franchement son compagnon.

— Merci, fit-il, de la joie plein ses yeux clairs. Et étendant les bras :

— La vie est belle, le ciel est bleu, la route est large…

— … Le clairon sonne la charge, finit Béatrice, en faisant jouer de nouveau son claxon, bruyamment.

On voyageait par petites étapes, sans se presser, s’arrêtant pour admirer les beautés grandioses de ce sol tourmenté. Souvent les voyageurs prenaient leur repas sur la grève. Alors, de chauffeur émérite, Béatrice se muait en cordon-bleu accompli.

Un jour que l’on était ainsi à préparer une dînette, Gilles qui ouvrait le panier aux provisions, s’écria déçu :

— Mes amis, le garde-manger est vide, ou à peu près.

— Qu’est-ce que l’on fait alors, demanda Béatrice occupée à consolider, sur un feu, un poêlon plein de poissons qui commençaient à rôtir ?

— On va à la chasse aux victuailles, et c’est ce à quoi je me prépare, dit-il en se dirigeant vers une cabane adossée à un rocher, non loin du campement.