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— Toujours pour moi, à cause de moi, ça devient chronique, mon p’tit.

— Alors, tu as eu pour danseur le beau Gaston ?

— Oui, et j’en suis fière…

— Il y a de quoi, il danse avec la souplesse d’un ourson.

— Et comme il danse mieux que toi, juge de ta prestance…

— Par exemple, non ; et pour te prouver le contraire, voici.

Et Gilles entraîna Béatrice dans une ronde échevelée au son du radio qui jouait une romance.

— Là, es-tu convaincue ? dit-il en avançant un siège à sa compagne, la danse finie.

— Je n’en reviens pas ! Sais-tu qu’en plus d’être un danseur émérite, tu es un transpositeur de musique merveilleux.

— Oui ?

— Oui, tu viens de me faire danser un fox-trot sur une mesure de nocturne.

— Je ne m’en suis pas aperçu…

— Bien moi, je me suis aperçu d’une chose : tu ne nous conduis pas quand tu danses, tu nous secoues comme un pommetier.

— Mademoiselle craint pour la fleur de son teint, railla Gilles qui s’amusait ferme.

Aie ! Apprends ignorant que tout ce que nous faisons pour être plus jolies, c’est pour vous plaire, monstres d’hommes.

— Ô charmes méconnus !

Elle tapa du pied.