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— Un voyage d’affaire. Je dois aller surveiller pendant quelque temps, trois semaines peut-être, certains travaux dont j’ai charge.

— Et vous partez quand…

— Après-demain.

Pour montrer à son mari qu’elle n’était pas tout à fait indifférente à ce qui le touchait, Alix fit adroitement allusion à ses travaux. Aussi adroitement, Paul bouta l’ouverture.

Non. Dans ce coin privé de sa vie, où il pouvait encore respirer, personne n’entrera.

Alix comprit, et, blessée, écourta la soirée. Son bonsoir fut froid.

Paul qui regardait s’éloigner cette femme altière, ne se doutait pas que la blessure qu’il venait de lui infliger, en figeant le beau visage, avait aussi fait saigner le cœur. Il regretta ses paroles. Il fut sur le point de rappeler sa femme, mais à quoi bon ?

— Rappeler Alix ? se dit-il, qu’est-ce que je lui dirais ! des banalités. Elle a rendu mon cœur muet, et de crainte qu’il se remettre à parler et dise les mots d’amour qu’il contient, je m’éloigne.

Le lendemain après-midi, Alix qui se croyait seule, pénétra dans la bibliothèque pour échanger un livre. En entrant dans la pièce comme le temps était sombre, elle poussa le commutateur. Celui-ci alluma une lampe sur pied dont la disposition de l’abat-jour projeta une lumière tamisée sur un large Chesterfield, placé près de la cheminée, et sur lequel Paul dormait.