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adolphe brassard

fiquent avec l’ennemi. Nous tâchons de l’apaiser, de lui prouver qu’il exagère, mais il sait. Il ne peut plus garder cela pour lui seul : il faut qu’il crie sa honte et son déshonneur.

Nous essayons de le consoler :

— Tu t’es mépris, mon vieux. Des armes, des munitions, c’est tout pareil. Comment peux-tu reconnaître ?

— Pour avoir travaillé des années dans les usines de mon père, je connais les marchandises qu’on y fabrique.

— Mais, enfin, comment peux-tu savoir pour sûr ? Allons donc !

— L’autre jour, des Allemands capturés portaient des fusils avec la marque de nos usines.

— La belle affaire ! Mais, ils les avaient pris à des Français blessés ou faits prisonniers. Tu vois ?

— Croyez-vous que depuis huit mois que je sais, je n’ai rien découvert d’irréfutable ? Oh ! je voulais douter, ne pas croire ; mais dans une des caisses, butin d’une tranchée conquise, j’ai trouvé,