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adolphe brassard

Pour avoir affronté le danger, s’être mesuré avec lui, y avoir échappé, ses yeux sont fiers, hardis. Il est beau comme un jeune dieu.

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Une rumeur d’armistice nous atteint au milieu d’un engagement. D’où vient-elle ? De partout ! Elle se glisse entre la mitraille, entre les armes qui se croisent, et avertit chaque combattant dont les gestes, à la nouvelle, deviennent plus désespérés.

Il ne faut pas mourir alors que le ciel s’éclaire de bleu exprès pour soi, et que l’on hume déjà l’air natal. Il ne faut pas mourir quand, là-bas, on nous tend les bras au pas des portes ouvertes, et que l’odeur du pain connu nous enveloppe. Quand des voix maternelles se font entendre et qu’à nos oreilles chante la romance, il ne faut pas mourir. Il ne faut pas mourir quand s’avance l’épousée qui sourit à l’enfant appuyé à son sein et qu’à l’horizon pointe la paix.