Page:Brassard - Les Mémoires d'un soldat inconnu.pdf/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.
182
adolphe brassard

gures. Mais, pour ne pas l’alarmer, je dis :

— Mais oui, petit, c’est plus calme, un calme inusité, tu as raison, la fin se fait pressentir. Que Dieu te protège !

— Et qu’il vous garde, monsieur !

Cette sympathie m’électrise. Je saurai protéger cet enfant.

***

La bataille se poursuit. Les engins de destruction continuent leur œuvre d’anéantissement. Les obus bouleversent ce qui déjà a été bouleversé, frappent cent fois ce qui déjà cent fois a été frappé, creusent et remplissent des cratères, et, dans des sillons sacrilèges, déterrent les morts, violent les tombes. Tout agonise dans la nature. Jamais plus l’écho ne pourra reproduire autre chose que des cris de rage et de douleur, des blasphèmes et des râles. Les buissons se chargeront d’épines, non de fleurs ; le suc des fruits prendra goût