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adolphe brassard

mort ? Je ne m’en préoccupe pas. Je n’entends qu’un bruit léger, confus, comme l’eau qui remue sur les cailloux. Un voile blanc se penche et s’éloigne de mes yeux dans un mouvement d’éventail, et un sourire doit être figé sur mes traits.

Mais, soudain, une douleur aiguë traverse ma jambe à laquelle répond un élancement à la tête, et ça augmente : on dirait que de longues aiguilles se font un chemin dans mes chairs cherchant une place pour sortir. Je comprends que j’étais sous l’influence d’un calmant, et que l’effet s’en va. La douleur disparaît. Je retiens mon souffle pour la dérouter, me cacher d’elle, l’empêcher qu’elle me trouve, et je fais comme l’enfant qui est parvenu à s’éloigner d’une chose qui l’a effrayé : je pousse un soupir craintif de délivrance. Mais la douleur n’était qu’assoupie, elle revient, et j’ai l’impression qu’elle me guettait avec méchanceté. Elle s’implante par secousses pointues,