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les mémoires d’un soldat inconnu

village dévasté, pendant que sur la route défoncée meurent les violées.

Il n’y a donc plus de pitié ?

On a voulu la guerre pour que, plus tard, la race soit forte, et la guerre renvoie des régiments d’hommes dont la folie remplace l’intelligence.

On a voulu la guerre pour assurer la paix et la prospérité des générations futures, et la guerre renvoie des régiments d’hommes mutilés dans les parties sexuelles.

On a voulu la guerre pour sauver la liberté, faire revivre la beauté, et la guerre renvoie des êtres aux joues, au nez, à la bouche arrachés ; et dans les camps de détention croupissent les prisonniers.

Ah ! vraiment, pour chanter la glorieuse épopée, il y aura des mutilés, des éclopés, des défigurés. Rome, Paris, Londres peuvent célébrer les victoires, mais il y aura des mains de métal pour applaudir, des béquilles et des jambes de bois pour soutenir le chahut.