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CROQUIS DU VICE

gradins en bois la foule s’entasse, transpire dans une chaleur lourde, puante de chair surchauffée. Les relents d’une nourriture de guinguette et des vins bus dans un hoquet s’y confondent en une odeur aigre, étouffée, de friture et d’huile à brûler qu’exhalent des lampes, en une fumée grise.

C’est dans cette crasse, dans le coudoiement de cette cohue qu’Héliogabe aimait à venir tous les soirs passer quelques instants. Il arrivait régulièrement au milieu de la représentation, un peu avant que parût en scène Goliath, et partait dès l’hercule disparu.

Doué d’une force peu commune, sans effort et sans qu’un muscle de ses bras ne tressaille, Goliath soulevait une haltère de deux cents livres, jonglait avec des poids énormes, les jetait, les rattrapait en des déhanchements, des contorsions, des effets de torse, qui étaient le signal d’une pluie de bouquets, de petits cris féminins, cependant qu’un roulement de tonnerre partait des galeries extrêmes et se prolongeait en vivats frénétiques.