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LES OISEAUX DE PROIE

change. Quand donc les clercs d’avocats auront-ils assez de bon sens pour comprendre qu’il n’a jamais plu à personne d’attendre. Où votre patron est-il allé ?

— Je crois qu’il a tourné du côté de Holborn, monsieur, » répliqua le jeune garçon en hésitant un peu.

Il savait très-bien que George avait des secrets pour son frère et qu’il ne convenait pas d’être trop prodigue d’explications. Mais Philippe lui paraissait fort redoutable, et celui-ci le questionnant, il pouvait d’autant moins s’empêcher de lui dire la vérité, que son maître n’avait pas eu la prévoyance de le munir d’un bon mensonge pour le cas où il en aurait besoin.

« De quel côté de Holborn ? demanda vivement Philippe.

— Il a parlé du bureau du télégraphe.

— C’est bien ! » s’exclama Sheldon, en s’élançant aussitôt vers l’escalier, laissant sur le seuil le jeune homme complètement ahuri.

Bureau du télégraphe signifie affaires, et tout ce qui se rapportait aux affaires de son frère avait, à ce moment, pour Sheldon, un intérêt particulier. Il avait médité dans le silence de son cabinet sur le sourire triomphant de George, et, plus il avait réfléchi, plus il s’était convaincu que son frère devait être engagé dans quelque grave et heureuse entreprise. De quelle nature était-elle ? Il considérait comme un devoir pour lui de le découvrir.

Tout entier à cette pensée, Sheldon rejoignit son cab et se fit conduire au bureau télégraphique. Le motif apparent de sa visite à Gray’s Inn était une excuse suffisante pour expliquer qu’il recherchait son frère ; il s’agissait d’une de ces bribes d’affaires assez piteuses, qu’il lui procurait de temps à autre.

Au moment où le cab s’arrêtait devant le bureau télégraphique, la figure de George disparaissait dans un