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LES OISEAUX DE PROIE

d’une journée. Que Matthieu vécût dans un autre lieu que celui où il était censé demeurer, cela résulte de plusieurs passages de ses lettres, tels que les suivants, à peu de chose près :

« J’ai été hier, jour du marché, à G***, où je me suis trouvé à l’improviste face à face avec le fils aîné de Peter Brown. Ce garçon a ouvert de grands yeux comme une oie en me regardant. Je lui ai rendu son regard avec les intérêts en lui disant que s’il était envieux de savoir mon nom, je m’appelais Simon Lubchick, fermier, pour le servir. Le pauvre nigaud m’a demandé humblement pardon en me disant qu’il me prenait pour un gentleman d’Ullerton… un ami de son père. Sur quoi je lui ai donné un shilling et nous nous sommes quittés parfaitement satisfaits l’un de l’autre. Ce n’est pas la première fois que la rencontre de gens d’Ullerton m’a donné la venette. »

« Parmi les lettres qui suivent il y en a de fort tristes. Le petit M*** est mort. Le cœur désolé du pauvre père exprime sa souffrance en termes fort nets :

« Novembre 1751. — Je remercie sincèrement ma chère sœur de sa bonne affection et de sa sympathie ; mais hélas ! il n’est plus ; et il me semble que sans lui je ne peux plus avoir aucun plaisir, aucune joie en ce monde… Un pauvre petit enfant de six ans, et pourtant si cher à mon cœur que la terre me paraît vide, et solitaire sans lui. N*** dépérit sensiblement ; elle garde le lit chaque jour davantage. En vérité, ma chère Ruth, je ne vois plus que des chagrins, de