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LES OISEAUX DE PROIE

« Cet extrait fait supposer que notre Matthieu aimait sincèrement la fille du comédien et n’avait à son égard que des vues honnêtes. La manière dont il repousse les doutes de sa sœur révèle une généreuse indignation et la résolution de ne pas épouser la fortune de Mlle Rebecca. Je commence à penser que la théorie de Sheldon au sujet d’un mariage antérieur et secret pourrait bien devenir un atout dans son jeu. Dieu seul sait combien pourra être long et difficile le travail nécessaire pour arriver à prouver ce mariage. Et alors même que nous parviendrions à en trouver la preuve, nous n’aurions avancé que d’un pas dans notre obscur sentier ; nous aurions encore à découvrir quelles ont été les suites de cette union et à suivre la trace des descendants inconnus de Matthieu pendant un siècle.

« Je me demande ce que faisait Sisyphe lorsque sans cesse son rocher retombait sur lui. A-t-il jamais regardé le sommet de la montagne pour calculer la distance qu’il avait encore à parcourir avant que sa tâche fût accomplie ?

« La lettre dans laquelle se trouve ensuite un passage qui mérite d’être transcrit est d’une date beaucoup plus récente et abonde en initiales. Le timbre de la poste est illisible. Je puis seulement reconnaître les lettres P O et L ; les deux premières l’une à côté de l’autre, la troisième après un léger intervalle. Le contenu indique qu’elle a dû être écrite de quelque triste village. Ce village ne serait-il pas Spotswold ? Les lettres P O et L, qui restent apparentes sur le timbre de la poste, s’ajusteraient très-bien avec le nom de ce village. C’est encore une question que j’abandonne à la sagacité de Sheldon. La date est de Mars 1749.