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LES OISEAUX DE PROIE

ter sa touchante histoire, je suis sûre que votre excellent cœur se serait ému. Ses infortunes sont les plus imméritées du monde. Son père est malade, en prison. Elle a perdu sa mère il y a trois ans, et la pauvre orpheline est seule pour soutenir son père malade et sa petite sœur. Songez à cela, madame Ruth, dans votre riche demeure. Je vous jure que Mme Molly est plus jolie qu’aucune des belles dames qui étaient à l’ouverture de la grande salle de danse de Ranelagh, au printemps dernier, où j’ai rencontré Mlle Cunings et lady Harvey, qui passe aussi pour une merveille. »

« Cet extrait me paraît démontrer de la manière la plus évidente que mon ami Matthieu s’est considérablement épris de la belle jeune femme dont il s’était constitué le défenseur dans quelque rixe. Cela s’accorde avec les renseignements que j’ai eus de mon vieux pensionnaire de l’hospice d’Ullerton, qui se rappelait avoir entendu son grand-père parler d’une intervention de Matthieu dans quelque bataille à la grande fête de Smithfield.

« Dans mon extrait suivant, il est encore question de Molly, après un intervalle de quatre mois. Il semblerait que Matthieu, dans ses confidences à sa sœur, eût été jusqu’à lui avouer sa tendresse pour la fille du pauvre bateleur des tréteaux de Londres ; mais je ne trouve rien de semblable dans les lettres que j’ai dans les mains. Une pareille lettre a pu être considérée par Mme Ruth comme trop dangereuse pour être conservée. La sœur de Matthieu n’était pas encore mariée à cette époque et vivait sous la sévère surveillance paternelle. Cette lettre de Matthieu me paraît avoir été écrite en réponse à quelque remontrance de Ruth.