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LES OISEAUX DE PROIE

pelle de ce nom, ce qu’on lui refuse généralement de faire, parce qu’il se donne des airs, fait l’important le soir sur la place. Le bruit court que son père est héritier légal d’un million en argent laissé par le dernier des Haygarth, et que lui et son fils ont intenté une action contre la Couronne pour réclamer cet héritage. Mais j’ai entendu le jeune Judson nier le fait, un jour qu’on lui en parlait dans ma salle à manger, et je ne pense pas que ce bruit soit bien fondé.

« Je suis fâché d’apprendre cela. M. Judson, l’avocat, ne serait pas un adversaire insignifiant. Je sentis que je devais me tenir à l’écart de Théodore Judson, l’avocat, et de son présomptueux fils, à moins que les circonstances ne m’obligeassent à marcher d’accord avec lui. En même temps, je pensais que tout ce que je ferais pour me rapprocher des autres Judson m’amènerait fatalement à connaître ces membres particuliers de la famille.

« — La famille Judson est très-unie ? demandai-je insidieusement.

« — Ma foi, oui et non. La plupart sont cousins au troisième ou quatrième degré, voyez-vous, et cela n’est pas une très-proche parenté dans une ville où il ne manque pas de concurrence et d’intérêts opposés qui nous divisent. Le jeune Théodore Haygarth Judson, comme il s’appelle lui-même, est intime avec Judson, de Saint-Gamaliel ; ils ont été au collège ensemble, voyez-vous, et ils se donnent de l’importance parce qu’ils ont passé une couple d’années ou à peu près à l’Université de Cambridge. Ces deux-là s’entendent très-bien, mais Judson, le filateur, ne parle ni à l’un, ni à l’autre, lorsqu’il les rencontre dans la rue, et il s’est souvent mal exprimé sur leur compte dans ma salle à manger. Wil-