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LES OISEAUX DE PROIE

définitive, tourner au profit de ma belle-fille, ce n’est que justice que vous en profitiez dans une certaine mesure. En attendant, nous ne saurions prendre les choses trop tranquillement. Je ne suis pas homme à m’enflammer, sachant d’ailleurs combien d’espoirs ont été brisés par la Haute Cour de Chancellerie. Votre grande découverte peut n’aboutir, en définitive, qu’à une déception et à une dépense d’argent. De même elle peut arriver à une conclusion aussi avantageuse que mon frère et vous paraissez l’espérer. Tout ce que je demande, c’est que le cœur innocent de la pauvre Charlotte ne soit, à aucun moment de sa vie, torturé par l’incertitude. Il vaut mieux ne rien lui dire de cela. Elle paraît être parfaitement heureuse dans sa position actuelle, et il y aurait plus que de la folie à troubler son esprit par de vagues espérances qui peuvent ne jamais se réaliser. Elle aura certainement à faire un peu plus tard des déclarations sous la foi du serment, etc. Quand ce moment viendra, on pourra lui dire qu’il s’agit d’une réclamation à faire dans son intérêt ; mais avant, elle n’a besoin de rien savoir. Voyez-vous, mon cher, j’ai déjà vu tant de choses pareilles n’aboutissant qu’à des misères, qu’il faut me pardonner mon excessive prudence. »

C’était juger toute l’affaire sous un jour nouveau. Jusqu’à ce moment Valentin s’était imaginé que, une fois le lien de parenté nettement établi, il suffirait que la réclamation de Charlotte fût présentée pour qu’elle eût gain de cause. La froide et pratique opinion exprimée à ce sujet par Sheldon soulevait toute espèce de doutes et de difficultés ; la chose devenait plus compliquée, plus mystérieuse,

« Et vous croyez vraiment qu’il vaudrait mieux ne pas en parler à Charlotte ?