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LES OISEAUX DE PROIE

homme de condition modeste, un simple brocanteur, mais dévot et zélé, qui me vend du thé noir, du vrai thé noir, celui de la Reine. Après que je l’eus ainsi rembarré, sans mauvaise intention, M. Haygarth se mit à soupirer, puis il reprit tout à coup :

« — Lorsque je serai sur mon lit de mort, femme, je te parlerai. N’oublie pas de me le demander. Et si je venais à mourir subitement, tu feras bien de chercher dans le vieux bureau en bois de rose, où tu trouveras une lettre. Je t’écrirai ce que je ne pourrai te dire.

« Avant que j’aie eu le temps de lui répondre, M. Bagot est arrivé, et nous nous sommes mis à table. Après le dîner, il nous a lu le Sixième Chapitre des Hébreux, qu’il nous a longuement commenté. Il n’avait pas terminé, que Satan s’était complètement emparé de M. Haygarth qui dormait en ronflant bruyamment. »

Ceci fait clairement allusion à un secret que la sotte fanatique, Mme Haygarth, s’est laborieusement étudiée à ne pas entendre. L’extrait suivant fait partie d’une lettre écrite après que les lèvres qui n’avaient pu parler ont été closes à jamais. Ah ! Mme Rebecca, vous n’étiez qu’une humble mortelle, bien que vous ayez pu paraître une lumière des plus éclatantes parmi les sectateurs de Wesley, car que n’auriez-vous pas donné alors pour pénétrer le secret du pauvre Matthieu ?

« … Quelques jours s’étant écoulés depuis le fatal événement, je me suis rappelé ce que m’avait dit mon mari avant que je quittasse Dewsdale pour aller à des assemblées religieuses à Kemberton et aux environs. Je suis revenue seulement deux semaines