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LES OISEAUX DE PROIE

Heureusement cette ombre ne s’élevait pas souvent entre lui et la lumière de ces yeux chéris qui étaient son étoile polaire.

Les jours devenaient plus courts en décembre et le thé de l’après-midi était pour Charlotte et son bien-aimé un moment d’autant plus délicieux qu’ils le passaient dans une mystérieuse demi-obscurité ; un rayon de jour gris se glissait froidement à travers les rideaux ouverts, comme un spectre dont la surveillance enviait le bonheur de ces heureux mortels, en même temps que la lueur rouge du foyer sans flammes se reflétait sur les courbures et les saillies d’acier de la cheminée.

Être assis auprès du feu, à cinq heures de l’après-midi, épiant sur la figure de Charlotte les changements de lumière, les lueurs rosées qui semblaient caresser complaisamment ses longs cils baissés et ses douces lèvres, était un bonheur inexprimable pour Haukehurst. Pendant que Mme Sheldon s’assoupissait paisiblement sous l’abri protecteur d’un écran, la conversation des deux amoureux prenait un tour libre, fou, charmant.

Un soir Valentin s’attarda un peu plus qu’à l’ordinaire. L’on approchait de Noël, et le jeune homme avait apporté son tribut sous la forme d’un paquet de Contes de Noël. Tennyson avait été mis de côté à cause de la fête.

Valentin avait lu, parmi ces contes, les plus fantastiques au grand agrément de ses auditeurs dans le salon de Mme Sheldon. Après le thé, ils étaient assis autour de la cheminée contant force histoires de revenants et discutant l’insoluble question de savoir si de semblables apparitions se sont jamais vues, question qui semble avoir été débattue depuis que le monde existe.

« Le docteur Johnson croyait aux revenants, dit Valentin.