Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome II.djvu/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
165
LES OISEAUX DE PROIE

« — Je ne peux rien vous en dire.

« Il me paraît plus que probable que l’opinion des amis de la pauvre femme était exacte et que Kingdon était un vaurien ; mais quelle a pu être l’existence de Susan pendant les quinze années durant lesquelles on l’a perdue de vue ? Ne peut-elle pas s’être mariée avec quelque autre que Kingdon ? Ne peut-elle pas avoir laissé des héritiers qui surgiront plus tard pour venir contester les droits de ma bien-aimée ?

« Est-ce une bonne chose que d’être l’héritier d’une grande fortune ? Il fut un temps où il n’aurait pas été possible qu’une pareille question se posât à mon esprit. Ah ! quel subtil pouvoir possède ce qu’on appelle l’amour pour ainsi transformer le cœur humain ! Ah ! combien il me tarde d’être aux pieds de ma bien-aimée, la bénissant de la cure miraculeuse qu’elle a opérée !

« J’ai rapporté à Sheldon l’histoire de Susan telle qu’elle m’a été rapportée par l’oncle Joseph. Il est d’accord avec moi sur l’importance de la dernière lettre, mais, si habile qu’il soit, il ne voit pas le moyen de se procurer ce document sans initier plus ou moins M. Mercer à notre affaire.

« — Je pourrais bien faire à Mercer quelque histoire au sujet d’une petite somme d’argent à revenir à sa nièce, et obtenir peut-être ainsi la lettre de Susan, dit-il ; mais ce que je lui dirais arriverait infailliblement d’une manière ou d’une autre à la connaissance de Philippe, et je ne veux pas m’exposer à mettre celui-ci sur la piste.

« L’esprit défiant de mon Sheldon est plus que jamais porté à la prudence, depuis qu’il sait que l’héritière des Haygarth est alliée d’aussi près à son frère.

« — Je vais vous dire ce qui en est, me dit-il après que