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LES OISEAUX DE PROIE

« — Alors, ce gentleman n’eût pas été un parti bien avantageux pour Mlle Meynell, si…

« — S’il l’eût épousée ?… Non, mon garçon, et c’est peut-être quand elles connurent sa pauvreté que Susan et sa sœur jugèrent qu’il n’y avait pas entre les deux amoureux une si grande différence de situation. Toujours est-il que les deux femmes lui furent favorables. Elles ne dirent rien de l’affaire à Halliday, qui avait la tête près du bonnet, comme on dit, et était dans son genre aussi fier qu’un lord. Le secret fut assez bien gardé pendant quelque temps. M. Kingdon venait toutes les fois que James s’absentait ; mais les gens de ce pays sont très-perspicaces, et bien que cet endroit soit assez retiré, il y passe pas mal de monde du lundi au samedi, si bien que l’on en vint peu à peu à remarquer qu’il y avait souvent à la grille un cheval attaché par la bride à l’un des barreaux. Ceux qui étaient mieux informés reconnurent ce cheval comme appartenant à M. Kingdon. Un ami de Halliday lui en parla un jour en le prévenant que M. Kingdon était un vaurien qui, disait-il, avait déjà une femme en Espagne. C’en fut assez pour Halliday. Il entra dans une grande fureur en apprenant que quelqu’un et surtout le frère de lord Durnsville, se permettait de venir chez lui courtiser sa belle-sœur. Ce fut à Barngrave qu’il apprit cela un jour de marché, pendant qu’il flânait avec quelques amis dans la vieille cour de l’auberge du Taureau Noir, où le marché au blé se tenait à cette époque-là. Il demanda son cheval une minute après et quitta la ville au galop. Lorsqu’il arriva, il reconnut la jument de M. Kingdon, attachée à la porte, puis M. Kingdon lui-même, se dandinant dans le jardin à côté de Mlle Meynell.

« — Et je présume qu’il y eut une scène ? suggérai-je,