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LES OISEAUX DE PROIE

temps du vieux James Halliday, mais il n’en est pas moins pénible de penser qu’aucun de ceux qui sont nés sur cette terre n’ont laissé de petits enfants pour en hériter.

« L’oncle Joé resta pensif pendant quelque temps. Je songeais, de mon côté, à cet autre héritage d’une valeur cinquante fois supérieure à celle de la ferme qui, en ce moment, attendait un réclamant, et de nouveau je me demandai à moi-même :

« — Serait-il possible que cette charmante fille, dont la physionomie s’est attendrie à la mémoire de ses vieux parents, dont le cœur n’a jamais connu un désir intéressé, serait-il possible que ce fût elle dont les belles mains devront soustraire l’or des Haygarth aux griffes des avocats de la Couronne ?

« La vue de la vieille Bible semblait avoir ravivé les souvenirs de M. Mercer au sujet de sa première femme.

« — C’était une très-bonne créature, dit-il, tout le portrait de notre Charlotte ; je m’imagine quelquefois que c’est à cause de cela que j’ai pris Charlotte en affection dès son enfance. Je croyais voir les yeux de ma première femme lorsque Charlotte me regardait. J’avais dit à Tom que ce m’était une consolation d’avoir près de moi la fillette, et c’est à cause de cela qu’il la laissait venir si souvent. Pauvre vieux Tom ! il avait coutume de me l’amener lorsqu’il venait au marché, et me la laissait quelquefois des semaines entières. Plus tard, lorsque ma Dorothée que voilà a pris en pitié le pauvre veuf solitaire, elle s’est attachée à la jeune fille autant que si elle eût été sa mère, si ce n’est plus ; car, n’ayant pas d’enfants elle-même, elle les considère comme un bien si précieux, qu’elle ne croit jamais qu’on puisse les aimer et les soigner assez. Il y a un petit baby qui re-