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LES OISEAUX DE PROIE

tais engagé à garder le plus profond secret sur la nature et le résultat mes investigations, ignorant en même temps si cet engagement impliquait ou non l’observation du secret, même à l’égard des personnes que mes recherches intéressaient le plus. Jusqu’à plus ample information auprès de Sheldon, j’étais certainement condamné au silence.

« — J’ai une sorte d’intérêt qui se rattache au nom des Meynell, dis-je, car j’ai eu autrefois à m’occuper d’une affaire dans laquelle se trouvaient des personnes de ce nom.

« Ayant, à l’aide de ce faux-fuyant, abusé ma bien-aimée, je procédai à l’extraction de la Bible de la case où elle se trouvait. Le livre était tellement incrusté dans cette case que, pour l’en retirer, je dus faire un effort pareil à celui qu’exige l’arrachement d’une dent. C’était un vieux volume de noble apparence, bleui par la vétusté et imprégné de cette froide moiteur qu’exhale l’atmosphère d’une tombe.

« — J’aurai grand plaisir à examiner ce vieux livre, quand nous aurons de la lumière, dis-je.

« Heureusement pour mon secret, l’obscurité allait croissant ; la chambre n’était plus que faiblement éclairée par la lueur intermittente de la flamme du foyer.

« Je posai le livre sur une petite table, dans un coin, puis Charlotte et moi recommençâmes à causer jusqu’à l’arrivée des lumières, presque immédiatement suivies de l’oncle Joé. Je crains fort d’avoir, dans ce court intervalle, paru un amoureux fort distrait, car je ne pouvais concentrer ma pensée sur le sujet de notre conversation : mon esprit se reportait sans cesse à l’étrange découverte que je venais de faire, et je ne pouvais m’empêcher de me demander si, par une chance extraordi-