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LES OISEAUX DE PROIE

et nos éclats de rire s’élevaient jusqu’aux solives massives qui supportaient le vieux plafond. Si j’avais encore possédé la moindre parcelle de mon cœur, je l’aurais offert sans hésitation à ma tante, pardon ! à la tante de ma Charlotte qui est bien la plus gaie, la plus vive, la meilleure matrone que j’aie jamais rencontrée, avec un esprit naturel qui éclate dans ses purs yeux bleus.

« Charlotte paraît avoir tendrement aimé son père, le pauvre garçon qui est mort dans la maison de Sheldon, au grand déplaisir de celui-ci, je le crois. Les Mercer parlent beaucoup de Thomas Halliday, pour lequel ils paraissent avoir une très-grande affection ; ils s’expriment également avec une très-grande bonté sur les deux Sheldon, qu’ils ont connus jeunes mais je ne crois pas que ni l’oncle ni la tante soient bien capables de sonder les profondeurs des eaux dormantes de l’intelligence de Sheldon.

Après le dîner nous avons été, avec l’oncle, faire un tour dans la ferme : la dernière gerbe de blé avait été engrangée, de sorte que le personnel de la ferme jouissait d’une sorte de repos. Nous entrâmes dans un bâtiment carré, garni de nids pour les poules, et où je vis plus de bêtes emplumées que je n’en avais vu de ma vie ; nous fûmes ensuite visiter la porcherie, et l’inspection même de ces grognards turbulents m’était agréable, puisque Charlotte était là : sa vivacité joyeuse donnait de la gaieté même aux choses les plus vulgaires. Combien j’aurais aimé à être fermier, comme l’oncle, et à dévouer ma vie à Charlotte en même temps qu’à l’agriculture.

« Lorsque l’oncle eut fait les honneurs des cours de sa ferme ainsi que de ses machines à battre le blé, il nous quitta pour vaquer à ses devoirs de l’après-midi,