Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/220

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
216
LES OISEAUX DE PROIE

qui brillait dans le lointain, et un jeune et joli visage sous un petit chapeau noir en forme de turban. Oui, s’écria-t-il, c’est la plus adorable créature du monde et je l’aime à la folie. »

Il se leva pour aller à la rencontre de la plus adorable créature de ce monde, dont le nom terrestre était Charlotte. Elle se promenait avec Diana qui, pour des juges plus libres, aurait certainement paru la plus jolie femme des deux. Hélas ! pauvre Diana ! il fut un jour où Valentin avait dû se sermonner d’importance pour ne pas en devenir éperdûment amoureux. Il avait triomphé dans cette lutte de prudence et d’honneur contre ces amours naissants, uniquement pour être entièrement vaincu par les charmes plus puissants de Charlotte !

Les deux jeunes filles pressèrent la main de Valentin. Un observateur indifférent aurait pu s’apercevoir que les couleurs disparaissaient du visage de l’une, tandis que le rouge montait aux joues de l’autre. Mais Valentin ne vit pas la pâleur soudaine de Diana. Il n’avait des yeux que pour les rougeurs de Charlotte. Celle-ci ne vit pas davantage le trouble de sa meilleure amie. Et c’était peut-être le coup le plus amer. Ce n’est pas assez que quelques-uns pleurent quand les autres s’amusent ; il faut que ceux qui pleurent n’attirent l’attention, ni la consolation de personne.

La conversation fut, comme il arrive, aussi banale, aussi vide que possible, une vraie conversation de gens qui se rencontrent.

« Comment allez-vous, M. Haukehurst ?

— Très-bien ; je vous remercie.

— Maman va très-bien ; c’est-à-dire non, pas très-bien ; ce matin, elle a sa migraine. Elle y est très-su-