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LES OISEAUX DE PROIE

mal sa colère en pensant aux difficultés qu’il avait eu à vaincre, le terrain se trouve pour vous, par Dieu ! aussi aplani que celui d’un parterre à la française, et vous attraperez vos trois mille livres avant d’avoir eu le temps de vous y reconnaître.

— J’espère y arriver, » répondit froidement Valentin.

Il n’était pas homme à s’enflammer à la pensée de réaliser trois mille livres, bien que cette somme eût pu à la rigueur lui apparaître comme la fortune d’un petit Rothschild.

« J’ai certainement grand besoin d’argent et je suis tout disposé à travailler consciencieusement pour en gagner, si j’en trouve l’occasion. Mais pour en revenir à ce Matthieu Haygarth, votre idée est donc qu’il a pu faire un mariage antérieur à celui d’Ullerton ?

— Précisément. Il peut certainement se faire que cela n’ait pas eu lieu ; mais vous le voyez, cette chance est dans nos cartes, et du moment où elle est dans nos cartes, mon avis est que nous ferons bien de poursuivre l’histoire de la vie de Matthieu Haygarth, à Londres, de tâcher de découvrir là notre héritier avant de nous mettre en quête des Judson. Si l’on savait où et comment les Judson se sont mariés et multipliés avant de se perdre dans la foule, on n’aurait pas tant de peine à retrouver les ramifications de leur arbre généalogique, dit Sheldon avec un profond soupir.

— Ainsi soit-il ! s’exclama insoucieusement Haukehurst, nous laisserons de côté les Judson et piquerons des deux sur Matthieu Haygarth. »

Il parlait avec l’assurance d’un Hercule généalogique pour lequel les obstacles n’existent pas. Il semblait aussi prêt à agir que si George l’eût assuré que le plus proche parent de l’intestat était un Plantagenet.