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LES OISEAUX DE PROIE

très-heureuse d’être tombée sur une compagne qui n’avait pas sa pareille pour faire d’un bout de chiffon et de deux bouts de dentelle les plus jolis chapeaux du monde. Diana avait en effet cette adresse, cet esprit de ressources que développent les nécessités d’une vie errante et accidentée. Elle avait plus appris pendant les trois années de l’existence désordonnée qu’elle avait menée avec son père que pendant le cours de ses études régulières à l’institution de Priscilla. Elle avait appris le français à une table d’hôte, à une autre l’allemand. Elle avait pris des leçons de maintien dans les salles de concert, des leçons de toilette aux courses. Sincèrement reconnaissante de l’affection désintéressée que lui montrait Charlotte, elle faisait de son mieux pour satisfaire son amie et sa famille.

Elle y réussit admirablement. Mme Sheldon se plaisait infiniment mieux dans la société de sa fille, depuis qu’elle ne se sentait plus tenue en haleine du soir au matin par les mille curiosités de son jeune et vivant esprit. Elle aimait à rester paresseusement assise dans son fauteuil, pendant que les jeunes filles bavardaient en travaillant : de temps en temps elle semblait prendre une part à la conversation, et cela lui suffisait. Lorsque, pendant l’été, la peur de la chaleur lui faisait prendre la promenade en grippe, elle pouvait rester étendue sur un sofa à lire un roman ou écouter le ramage de ses petits oiseaux. Charlotte et Diana sortaient ensemble, suivies par un garçon en livrée, lequel, n’étant pas plus qu’un autre à l’abri des faiblesses humaines, restait souvent en arrière, regardant les enseignes des boutiques ou les caricatures du Punch à la devanture des libraires.

Sheldon se faisait un devoir d’être agréable à sa belle-