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LES OISEAUX DE PROIE

— Qu’entendez-vous par dresser mes plans ? demanda Philippe.

— C’est un point que nous ne discuterons pas maintenant, Philippe, répondit froidement l’avocat. Nous nous entendons parfaitement l’un et l’autre, sans qu’il soit besoin d’entrer dans d’ennuyeux détails. Vous m’avez promis, il y a un an, avant la mort de Tom, que si jamais il vous arrivait une bonne fortune, j’y participerais. Il vous en arrive une qui dépasse ce que vous pouviez imaginer, et j’espère que vous tiendrez Votre parole.

— Et qui vous dit que je ne veuille pas la tenir ? demanda Philippe, comme froissé. Vous n’avez pas besoin de vous mettre tant à crier ; pourquoi prendre le ton d’un voleur de grand chemin ? Mettez-moi le pistolet sur la gorge pendant que vous y êtes. Allons !… allons !… ne vous alarmez pas ainsi. J’ai dit que je ferais pour vous ce que je pourrais… Je ne puis ni ne veux en dire plus… »

Les deux hommes échangèrent un regard ; ils avaient l’habitude de mesurer les choses et les hommes à un point de vue éminemment pratique. À ce moment-là, tous les deux se toisèrent à leur véritable taille. Cela fait, ils se quittèrent le plus cordialement du monde, avec force protestations d’amitié, de bon vouloir, etc. George retourna à sa chambre poussiéreuse de Gray’s Inn et Philippe se prépara à retourner à Barlingford pour conclure son mariage avec Georgina.

Depuis neuf ans, Georgy était la femme de Philippe et elle n’avait eu aucune raison pour se plaindre de son deuxième choix ; sa vie s’était écoulée paisiblement depuis que son premier adorateur était devenu son époux. Sa façon de comprendre la vie s’était sensiblement mo-