et certainement je n’eusse pas été aussi agitée s’il n’avait rien dit d’horrible. »
Lady Audley s’était servi de l’argument le plus fort en faveur de sa cause.
« Sans doute, ma chère, sans doute… mais qui a pu loger cette malheureuse idée dans la cervelle du pauvre Robert ? Ce M. Talboys, un étranger pour nous… assassiné à Audley ! J’irai ce soir à Mount Stanning voir Robert. Je le connais depuis son enfance, et je ne me tromperai pas sur son compte. Si sa cervelle est détraquée, il ne pourra me le cacher. »
Milady haussa les épaules.
« La chose n’est pas sûre ; c’est généralement un étranger qui constate le premier ces particularités psychologiques. »
Ces grands mots sonnaient étrangement dans la bouche mignonne de milady, mais sa sagesse d’emprunt avait quelque chose de ravissant aux yeux de son mari.
« Il vous est impossible d’aller à Mount Stanning, reprit-elle tendrement. Souvenez-vous que le docteur vous a défendu de sortir jusqu’à ce que le temps se fût adouci, et que le soleil vînt éclairer ce triste pays de glace. »
Sir Michaël Audley retomba dans son large fauteuil d’un air résigné.
« C’est vrai, Lucy ; il faut obéir à M. Dawson. J’espère que Robert viendra me voir demain.
— Oui, je crois qu’il viendra.
— Alors nous attendrons jusqu’à demain ; je ne puis m’imaginer que ce pauvre garçon ait la cervelle détraquée… cela me paraît incroyable, Lucy.
— Comment donc expliquer son erreur extraordinaire au sujet de M. Talboys ? » demanda milady.
Sir Michaël secoua la tête.
« Je ne sais pas, Lucy… je ne sais pas. C’est tou-