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DE LADY AUDLEY

« Après que nous aurons visité le salon, je désirerais montrer à ces messieurs l’appartement de lady Audley. Est-il en bon ordre, Phœbé ?

— Oui, miss, mais la porte de l’antichambre est fermée à clef, et j’imagine que madame a emporté la clef à Londres.

— Emporté la clef !… Impossible… s’écria Alicia.

— En vérité, miss, je crois qu’elle l’a emportée. Je ne puis la trouver, et elle a coutume d’être toujours sur la porte.

— Je déclare, dit Alicia avec impatience, qu’il n’y a rien après tout, dans cette sotte fantaisie, qui ne soit conforme aux façons de milady. J’ose dire qu’elle a eu peur que nous allassions dans son appartement fouiller dans ses jolies toilettes et toucher à ses bijoux. C’est vraiment contrariant, car les meilleurs tableaux de la maison sont dans cette antichambre. Il y a là son propre portrait, il est inachevé ; mais d’une ressemblance parfaite.

— Son portrait ! s’écria Robert Audley. Je donnerais quelque chose pour le voir, car j’ai seulement une idée imparfaite de sa figure. Il n’y a pas d’autre chemin pour entrer dans la chambre, Alicia ?

— Un autre chemin ?

— Oui, y a-t-il quelque porte, en passant par les autres pièces, par laquelle nous puissions parvenir à pénétrer dans la place ? »

Sa cousine secoua la tête et les conduisit dans un corridor où se trouvaient quelques portraits de famille. Elle leur montra une chambre tendue de tapisseries, et les grands personnages sur le canevas fané qui paraissaient menaçants dans la demi-obscurité.

« Ce gaillard, avec sa hache d’armes, a l’air de vouloir fendre en deux la tête de George, dit M. Audley, montrant un farouche guerrier dont l’arme soulevée paraissait au-dessus de la noire chevelure de George