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CHAPITRE VIII

Avant l’orage.

Le dîner au château d’Audley était donc ajourné, et miss Alicia eut plus longtemps encore à attendre la présentation du beau jeune veuf, M. George Talboys.

J’ai peur, à dire vrai, qu’il n’y eût peut-être une certaine affectation dans l’empressement que cette jeune fille témoignait de faire la connaissance de George ; mais si la pauvre Alicia spécula un moment sur la possibilité d’exciter, par cette démonstration d’intérêt, quelque étincelle de jalousie cachée dans le fond du cœur de son cousin, elle n’était pas aussi bien renseignée qu’elle aurait pu l’être sur le caractère de Robert Audley. Indolent, beau et indifférent, le jeune avocat considérait la vie dans son ensemble comme une duperie assez absurde, pour qu’aucun événement, dans sa sotte durée, méritât un instant d’être considéré comme sérieux par un homme sensé.

Sa jolie cousine, à la figure de lutin, aurait pu avoir de l’amour pour lui par-dessus la tête et les oreilles, et le lui faire entendre en ces termes charmants et détournés, qui n’appartiennent qu’aux femmes, cent fois en un jour, pendant les trois cent soixante-cinq