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DE LADY AUDLEY

Il se rappelait ce qu’il avait dit le jour précédent à Southampton…

« Une main qui est plus forte que la mienne me fait signe du doigt d’avancer sur la route sinistre. »

Un quart d’heure auparavant, il avait cru que tout était fini, et qu’il était délivré du terrible devoir de découvrir le secret de la mort de George. Maintenant cette jeune fille, cette jeune fille insensible en apparence, avait trouvé une voix, et le pressait de continuer la poursuite de sa destinée.

« Si vous saviez dans quel malheur je puis être enveloppé en découvrant la vérité, miss Talboys, dit-il, vous voudriez à peine me demander de faire un pas de plus dans cette affaire.

— Mais je ne vous interroge pas, répondit-elle avec une passion contenue. — Je ne vous interroge pas. Je vous demande de venger la mort prématurée de mon frère. Voulez-vous le faire, oui ou non ?

— Si je réponds non ?

— Alors je le ferai moi-même ! s’écria-t-elle en le fixant avec ses yeux brans éclatants. Je suivrai moi-même la piste de ce mystère ; je trouverai cette femme… oui, quoique vous refusiez de me dire dans quelle partie de l’Angleterre mon frère a disparu. Je voyagerai d’une extrémité du monde à l’autre pour découvrir le secret de son sort, si vous refusez de le découvrir pour moi. Je suis majeure ; je suis ma propre maîtresse ; je suis riche, car j’ai de l’argent que m’a laissé une de mes tantes. Je suis en position de bien payer ceux qui m’aideront dans mes recherches, et je le ferai pour qu’ils aient intérêt à me bien servir. Choisissez entre ces deux alternatives, monsieur Audley. Sera-ce vous qui trouverez le meurtrier de mon frère, ou sera-ce moi ? »

Il la regarda en face et vit que sa résolution n’était pas le fruit d’une exaltation passagère de femme, mais