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DE LADY AUDLEY

taches fauves, aura découvert le chien d’arrêt particulier avec les taches qu’il réclame, — heureuse combinaison de circonstances qui semble à peine croyable, — ils consentiront à me donner mes bagages et à me laisser aller. Les rusés coquins ont vu d’un coup d’œil que j’étais né pour être dupe, et que, me foulassent-ils même aux pieds jusqu’à m’ôter la vie sur cette plate-forme, je n’aurais jamais le courage d’intenter une action à la Compagnie. »

Une idée soudaine sembla le frapper, et il laissa le facteur lutter pour recouvrer son bien, et fit le tour pour rejoindre l’autre côté de la station.

Il avait entendu sonner une cloche, et, regardant l’horloge, il s’était souvenu que le train descendant à Colchester allait se mettre en marche en ce moment. Il avait appris à poursuivre ardemment un but depuis la disparition de George Talboys, et il atteignit le côté opposé de la gare à temps pour voir les voyageurs prendre leurs places.

Il y avait une dame qui venait d’arriver tout juste à la station, car elle s’élança dans la gare à l’instant même où Robert approchait du train, et heurta presque ce gentleman dans sa grande précipitation.

« Je vous demande pardon, » commença-t-elle avec cérémonie ; puis, levant les yeux au-dessus du gilet de M. Audley, qui était à peu près au niveau de son joli visage, elle s’écria : « Robert ! vous à Londres ! déjà !

— Oui, lady Audley ; vous avez parfaitement raison, l’auberge du Château est une triste résidence, et…

— Vous vous en êtes lassé. Je savais qu’il en serait ainsi. Faites-moi le plaisir d’ouvrir pour moi la portière de la voiture : le train va partir dans deux minutes. »

Robert Audley examinait la femme de son oncle avec une contenance et une expression embarrassées.