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LE SECRET

Elle lui tendit la main ; il la prit mollement dans la sienne. Il semblait que cette petite main si frêle, il eût pu l’écraser dans sa solide poigne, s’il eût été sans miséricorde.

Il l’accompagna à sa voiture, et considéra l’équipage, qui ne partit pas du côté d’Audley, mais dans la direction de Brentwood, qui est à peu près à six milles de Mount Stanning.

Une heure et demie environ après cette visite, comme Robert se tenait à la porte de l’auberge, fumant un cigare et regardant tomber la neige dans les champs qu’elle blanchissait en face de lui, il aperçut le brougham revenir, vide cette fois, vers la porte de l’auberge.

« Avez-vous ramené lady Audley au château ? dit-il au cocher qui s’était arrêté pour demander un pot de bière chaude épicée.

— Non, monsieur, je reviens à l’instant de la station de Brentwood. Milady est partie pour Londres par le train de midi quarante minutes.

— Pour Londres ?

— Oui, monsieur.

— Milady partie pour Londres ! dit Robert en rentrant dans la petite salle. Alors je veux la suivre par le prochain train, et si je ne me trompe fort, je sais où la trouver. »

Il fit son porte-manteau, paya sa note, dont le montant fut reçu avec empressement par Phœbé Marks, attacha ses chiens ensemble avec deux colliers en cuir et une chaîne, et monta dans l’accélérée aux essieux criards, remisée à l’auberge du Château pour la convenance de Mount Stanning. Il prit l’express qui partait de Brentwood à trois heures, et, s’asseyant confortablement dans un wagon vide de première classe, empaqueté dans une couple d’épaisses couvertures de voyage, il se mit à fumer