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DE LADY AUDLEY

— Oui, c’est cela… M. George Talboys !… un assez singulier nom, par parenthèse, et certainement, sous tous les rapports, un très-singulier personnage. L’avez-vous vu dernièrement ?

— Je ne l’ai pas vu depuis le 7 septembre, depuis le jour où il me laissa endormi dans les prairies de l’autre côté du village.

— Ah ! mon Dieu ! s’écria milady. Quel étrange jeune homme ce doit être que ce M. George Talboys. Je vous en prie, racontez-moi tout ce que vous savez sur lui. »

Robert raconta, en quelques mots, sa visite à Southampton et son voyage à Liverpool, et leurs différents résultats ; milady écoutait avec grande attention.

Afin de mieux faire ressortir les péripéties de cette histoire, le jeune homme quitta son fauteuil, et, traversant le salon, prit place en face de lady Audley, dans l’embrasure de la croisée.

« Et que concluez-vous de tout ceci ? demanda milady, après un moment de silence.

— C’est un si grand mystère pour moi, répondit-il, que j’ose à peine en tirer une conséquence quelconque ; mais au milieu de cette obscurité, je crois en tâtonnant être arrivé à deux suppositions qui me paraissent presque des certitudes.

— Et quelles sont-elles ?…

— Premièrement, que George Talboys n’est pas allé plus loin que Southampton ; secondement, qu’il n’est pas même allé du tout à Southampton.

— Mais vous y avez trouvé ses traces ; son beau-père l’a vu.

— J’ai mes raisons pour douter de la droiture de son beau-père.

— Bon Dieu ! s’écria milady d’un air alarmé : que voulez-vous dire par tout cela ?

— Lady Audley, répondit gravement le jeune homme, je n’ai jamais exercé comme avocat. J’ai embrassé une