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LA TRACE

ouvrage, à un penny le numéro, qui racontait les aventures d’un célèbre bravo de cette cité.

Pour les esprits ardents des jeunes citoyens du bord de l’eau, la rivière enflée était une source de délices pures et sans mélange. Faire un tour de circumnavigation dans la cuisine inondée, sur un cuvier à lessive, avec un plumeau pour mât, est peut-être, à l’âge de six ans, une sorte de plaisir plus grand que celui que nous éprouvons, dans un âge plus avancé, quand nous pouvons errer sur les splendides hauteurs des Alpes et dans les magnifiques paysages d’Écosse, alors que la raison nous a instruits par ses froides leçons, et que nous savons que, tandis que le soleil brille pour nous sur un versant de la montagne, les ombres nous attendent de l’autre côté.

Voici un gentleman en saute-en-barque et en chapeau blanc, qui fume une pipe de terre très-courte et très-culottée. Je me demande ce qu’il pense de la rivière.

Huit années se sont écoulées depuis sa dernière apparition à Slopperton ; il était venu alors comme témoin dans le procès de Richard Marwood ; alors il avait un œil poché et les coudes percés. Maintenant son organe visuel n’est nullement entouré de nuances violacées qui altèrent sa couleur naturelle, d’un brillant gris-clair. Maintenant aussi, pour user du langage familier, il est bien emplumé ; son