Page:Braddon - La Trace du serpent, 1864, tome I.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
DU SERPENT.

fut près de s’éteindre, il approcha, sans y penser, le papier de la flamme, et s’en servit pour allumer sa pipe.

Presque aussitôt il vit ce qu’il venait de faire. Il venait de brûler la lettre d’introduction, la seule pièce au monde qui fût en sa faveur. Il jeta à terre le papier enflammé, le foula aux pieds, mais en vain, malgré tous ses efforts, il ne resta de la lettre qu’un peu de cendre noire.

« Il faut que le diable me poursuive, s’écria-t-il. Je viens de brûler la lettre de mon oncle.

— Ah diable ! dit M. Jinks, j’ai bien vu des malins dans mon temps, et des forts, je vous assure, mais vous êtes le plus fort de tous ; ah ! vous faites joliment sauter la coupe, mon camarade !

— Je vous dis que cette lettre avait été écrite par mon oncle à un de ses amis de Gardenford ; et dans cette lettre il disait m’avoir donné cet argent qu’on a volé, dites-vous, dans son secrétaire.

— Oh ! la lettre disait tout cela, vraiment ? et vous vous en êtes servi pour allumer votre pipe. Vous ferez bien de dire cela au coroner, cela ne manquera pas de convaincre les jurés. »

L’employé subalterne de la police épelle de nouveau sur ses doigts les deux mots : Non coupable ! et sa bouche penche de plus en plus à gauche.

« Oh ! oh ! dit M. Jinks, il paraît que vous y tenez, hein ? Ma parole d’honneur, vous êtes trop intelli-