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LA TRACE

— Non, non, je ne suis pas indisposée. »

Elle garde de nouveau le silence, ses yeux ne sont pas fixés sur le chimiste, mais ils ont un regard étrange et vague. Elle lui demande soudain :

« Croyez-vous au magnétisme ? »

— Madame, j’ai usé la moitié des jours de ma vie à essayer de répondre à cette question, et je ne puis y répondre qu’à demi. Quelquefois oui, quelquefois non.

— Croyez-vous qu’il soit possible à une âme d’être douée de la mystérieuse prescience des sentiments d’une autre âme ? d’être triste, quand elle est triste, quoique n’ayant personnellement aucun motif de tristesse, et de se réjouir quand elle est heureuse, n’ayant aucune raison de se réjouir ?

— Je ne puis répondre à votre question, madame, parce qu’elle en entraîne une autre. Je n’ai pas encore découvert ce qu’est réellement l’âme. Le magnétisme animal, s’il devient jamais une science, sera une science toute matérielle, et l’âme échappe à toute dissection de la matière.

— Croyez-vous, alors, que par l’influence de quelque fluide, dont la nature nous est inconnue, nous puissions avoir la conscience étrange de la présence ou de la proximité de certaines personnes qui ne nous est révélée ni par la vue ni par l’ouïe, mais plutôt par une espèce de sensation qu’elles sont près de nous ?