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LA TRACE

alors que chaque lettre semblait un caractère écrit avec du feu, parce que la main de son amant l’avait tracée ; alors que le moindre morceau de papier, noirci des mots les plus ordinaires, était un précieux talisman, un joyau d’un plus grand prix que les diamants de tous les de Cévennes.

La courte journée d’hiver touche à sa fin, et dans l’obscurité naissante, un jeune homme en épais pardessus descend la rue large et paisible dans laquelle s’élève le pavillon. Une ou deux fois il regarde autour de lui pour voir s’il n’est pas observé, puis il entre précipitamment. Dans quelques minutes il est dans le boudoir à côté de Valérie. Le visage hautain de la jeune fille est plus pâle que la dernière fois qu’il l’a vu, et quand il lui demande avec tendresse la cause de ce changement, elle dit :

« J’ai été inquiète de vous, Gaston. Pouvez-vous me le demander ?

— Sa voix aussi, même sa voix est changée, dit-il avec anxiété. Attendez, je suis assurément victime d’une illusion grossière. Est-ce bien… est-ce bien Valérie. »

Le petit boudoir est seulement éclairé par la flamme du bois qui brûle dans le foyer. Il l’attire vers la clarté du feu, et la regarde en plein visage.

« Vous me croirez à peine, dit-il, mais pour un moment, j’ai presque douté que ce fût réellement vous. Les fausses alarmes, le voyage précipité, une