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LA TRACE

médecins. Cette dame désire prendre une leçon de chimie ; elle veut, bien entendu, n’expérimenter que sur des lapins, et elle a le cœur si tendre, que, comme vous pouvez vous en apercevoir, elle frémit à l’idée même de cette petite cruauté. Au reste, pour vous récompenser de votre peine, si vous lui donnez une plume et de l’encre, elle vous donnera sur son banquier un bon de cent louis. »

M. Blurosset ne paraît pas plus surpris à cette requête que si on lui eût demandé un verre d’eau ; il va à une armoire qu’il ouvre, et, après une courte recherche, choisit une petite boîte dans laquelle il prend quelques grains d’une poudre blanche qu’il enveloppe soigneusement dans un petit morceau de journal. Il est si habitué à manier ces compositions qu’il les traite avec très-peu de cérémonie.

« Ceci est un poison lent, dit-il ; pour un lapin tout à fait venu, la huitième partie de ce que vous avez là suffit ; la totalité empoisonnerait un homme.

— Madame en usera avec discrétion, dit Raymond, soyez tranquille. »

M. Blurosset tend le petit paquet, comme s’attendant à ce que Valérie le prenne ; elle recule d’un air plein d’horreur et frissonne en regardant attentivement le chimiste et Raymond de Marolles.

« Dans cet âgé dégénéré, dit Raymond en gardant les yeux fixés sur son visage, nos femmes ne peuvent elles-mêmes redresser leurs torts, quelque