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LA FEMME DU DOCTEUR.

elle l’avait vue une certaine fois, alors qu’il se dirigeait vers le vestibule pour lui faire accueil, mais toujours oppressée par cette sorte de cauchemar qui la poursuivait. Elle apercevait de petits points brillants de dorure ou d’étoffes soyeuses au milieu de l’obscurité froide de ces salons à demi éclairés et de longues barres de lumières brillant à travers les jalousies sur les parquets de chêne. Un des médecins, — il y en avait trois ou quatre dans la maison, — sortit de la bibliothèque et dit quelques mots à voix basse à Raymond. Les nouvelles étaient sans doute satisfaisantes, car le médecin alla rejoindre ses confrères, et Raymond fit monter à Isabel le grand escalier, cet escalier monumental plus digne d’une chapelle ou d’une église que d’une habitation particulière.

Ils trouvèrent une garde-malade dans le corridor ; c’était une femme coquettement attifée et d’aspect engageant, qui répondit aux questions de Raymond d’un air gai et décidé, comme si un Lansdell de plus ou de moins au monde était une question de peu d’importance. Puis un brouillard passa sur les yeux d’Isabel, et le sol sembla se dérober sous ses pas ; elle revint de cette faiblesse sous les parfums pénétrants des sels et des ingrédients aromatiques ; une main douce lui baignait le front d’eau de Cologne, et les vêtements d’une femme ondulaient auprès d’elle. Elle souleva ses paupières, qui lui semblaient très-lourdes, et une voix très-rapprochée lui dit :

— C’est beaucoup de bonté de votre part d’être venue. C’est sans doute la chaleur qui vous a fait évanouir. Raymond, donnez donc un peu d’air. Merci d’être venue.

Oh ! il n’était pas mourant ! À cette idée son cœur