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LA FEMME DU DOCTEUR.

drait certainement pas ; car elle lui avait dit, avec force protestations solennelles, qu’elle n’avait obtenu cet argent qu’avec la plus extrême difficulté et qu’elle ne pourrait pas s’en procurer davantage. Voilà ce qu’elle lui avait dit et il avait promis de ne pas l’assaillir de nouvelles demandes. C’était chose aisée pour Jack le Scribe de faire cette promesse ou toute autre ; mais alors même qu’il manquerait à sa parole, pensait Isabel, il y avait des chances pour que Roland quittât promptement le Midland et pour qu’il redevînt encore une fois un étranger et un nomade.

La femme du médecin était donc tranquille ; l’effroyable terreur de la dernière quinzaine n’oppressait plus son esprit, et elle était prête à faire son devoir, à suivre les leçons solennelles de M. Colborne et à veiller fidèlement, sans être dérangée par aucune peur ni aucune angoisse secrète, au chevet de George.

Des visages lugubres l’accueillirent à ce chevet. Jeffson n’abandonnait plus un instant son poste auprès de son jeune maître. Les herbes envahissaient tranquillement les plates-bandes ; et Brown Molly n’avait plus son pansage accoutumé. Le jardinier avait répandu une demi-charretée de paille dans la ruelle, afin que le bruit des charrettes rentrant les foins nouvellement coupés ne vînt pas troubler le sommeil fiévreux de George, si tant est qu’on pût appeler sommeil les assoupissements très-courts et irréguliers dans lesquels il tombait de temps en temps,

Ce matin-là, M. Pawlkatt examina son malade plus longtemps que de coutume. George était tombé dans une espèce de syncope et il ne reconnut pas son médecin, autrefois son rival. Il avait depuis longtemps cessé d’être inquiet au sujet de ses pauvres malades des ruel-