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LA FEMME DU DOCTEUR

misérable hutte, me demandant de sauver ses enfants comme si la chose avait dépendu de moi. Je ne puis oublier ce regard, Izzie. Il m’a poursuivi toute la nuit pendant que la lassitude m’a empêché de dormir. Et quand je pense à Pawlkatt faisant prendre ses drogues à ses enfants, je… je te dis que c’est inutile, ma chère amie ; je vais prendre une tasse de thé, puis me lever et m’habiller.

En vain Isabel pria-t-elle ; en vain appela-t-elle à son aide Mathilda, qui savait parler si franchement et si énergiquement et qui déclara que ce serait un suicide que de sortir ce jour-là ; en vain menaça-t-on de faire venir M. Pawlkatt. George se montra résolu ; les gens calmes sont presque toujours résolus, pour ne pas dire obstinés. Ce sont les natures vives, impétueuses, mobiles, qu’un souffle peut détourner du but ou du dessein qu’elles ont énergiquement juré d’accomplir. Gilbert écarta tous les arguments de la façon du monde la plus tranquille. Il était médecin, par conséquent il était le meilleur juge de l’état de sa santé. Ses malades l’attendaient ; il fallait qu’il se rendît près d’eux. Isabel et Mathilda s’éloignèrent avec une résignation mélancolique pour préparer le thé qui devait donner au médecin la force d’accomplir sa tâche. George descendit une demi-heure après, ayant l’air non pas malade, ni même faible, mais fiévreux et blême à la fois.

— Je n’ai absolument rien, ma chère Izzie, — dit-il à sa femme qui l’accompagnait jusqu’à la porte, — je suis seulement fatigué par trop de travail. Je me sens courbaturé dans tous les membres comme si je m’étais refroidi quelque part. Je suis sorti par un temps très-humide la semaine dernière, tu te le rappelles,