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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

« Une brebis saurait combattre pour défendre son agneau, pensa-t-elle avec colère. Mme Sheldon est au-dessous d’une brebis. »

C’était la première fois qu’elle avait une pensée malveillante pour cette pauvre âme faible, et sa colère se changea vite en pitié pour la malheureuse nature de Mme Sheldon, si complétement dominée par le joug qu’elle subissait.

Elle n’essaya plus de résister et elle se rendit dans la chambre de Charlotte pour tout préparer pour le voyage.

« Oh ! pourquoi ce voyage, chère ? dit Charlotte d’un ton plaintif. Je suis trop malade pour être transportée.

— C’est pour votre bien, ma chérie. M. Sheldon veut que vous soyez à proximité des grands médecins, qui vont vous rendre la force et la santé.

— Il n’y a pas de médecin qui puisse faire ce miracle. Laissez-moi ici, Diana ; priez papa de me laisser ici. »

Diana cacha son visage derrière l’épaule de la malade. Ses larmes l’étouffaient. Contenir l’explosion de la douleur était une torture presque impossible à endurer ; mais elle sut cacher toute trace de colère et de chagrin, et elle ne songea qu’à aider la voyageuse à supporter les fatigues du voyage.

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Charlotte était étendue sur un sofa, dans sa chambre à coucher, ayant auprès d’elle Nancy, quand le docteur Jedd arriva.

Il était six heures moins un quart, et le soleil couchant répandait ses rayons dans la chambre.

Le médecin vint avec Valentin et ne demanda pas voir Sheldon avant de se rendre à la chambre de sa malade ; il dit à la servante qui lui ouvrit la porte de le conduire auprès de Mlle Halliday.