mes là pour lui donner toute l’assistance possible. Voulez-vous nous aider, Aurora ?
— Vous aider !… comment ?
— En nous disant tout ce que vous savez relativement à la soirée du meurtre. Pourquoi étiez-vous dans le bois ce soir-là ?
— J’y étais pour rencontrer le mort.
— Dans quel but ?
Aurora se tut pendant quelques instants, puis levant son regard avec hardiesse et une demi-défiance, elle dit aussitôt :
— Talbot, avant de me blâmer ou de me mépriser, rappelez-vous comment le nœud qui me liait à cet homme a été rompu. La loi m’aurait délivrée de lui, si j’avais eu assez de courage pour en appeler à elle, et ne dois-je pas souffrir toute ma vie à cause de la faute que j’ai commise en ne demandant pas à être délivrée de cet homme dont l’évidente infidélité m’autorisait à divorcer ? Dieu seul sait ce que j’ai souffert avec lui. J’ai enduré son ton vulgaire, son insolence, son orgueil ; j’ai été souvent sans un sou, tandis que lui dépensait l’argent de mon père dans les maisons de jeu et aux courses ; j’ai été sans pain, tandis que lui buvait du champagne avec des fripons et des misérables. Rappelez-vous cela quand vous me blâmerez le plus. Je me rendis dans le bois pour le voir une dernière fois sur cette terre. Il m’avait promis qu’il émigrerait en Australie contre le payement d’une certaine somme d’argent.
— Et vous vîntes cette nuit pour la lui payer ? — dit vivement Talbot.
— Oui. Il fut insolent, comme il l’était toujours, car il me détestait, parce que j’avais découvert un moyen de l’empêcher de jamais rien réclamer sur ma fortune. Il se haïssait lui-même pour la folie qu’il avait faite en n’arrangeant pas mieux son jeu. Des mots de colère furent échangés entre nous ; mais il me réitéra son intention de partir pour Liverpool de bonne heure, le lendemain, et…
— Vous lui avez donné l’argent ?
— Oui.