Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/182

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
178
AURORA FLOYD

le long du chemin, emmenant des personnes d’une classe inférieure, pour lesquelles le temps n’était pas aussi précieux que l’or, et qui fumaient, dormaient, mangeaient et buvaient d’une manière assez résignée pendant les huit ou neuf heures de voyage.

Il faisait sombre lorsque Prodder atteignit la tranquille ville des courses, qu’il avait fuie au fort de la nuit si peu de temps auparavant. Il quitta la station, se dirigea vers le marché, et de là entra dans une ruelle étroite qui le conduisit dans une rue obscure aux extrémités de la ville. Il avait une grande frayeur d’être conduit par quelque malheureux accident du côté du Grand Cerf, de peur d’être reconnu par quelque serviteur de l’hôtel.

À mi-chemin, entre le commencement de cette rue écartée et l’endroit où elle dégénérait et se perdait dans un chemin de campagne, le Capitaine trouva une petite auberge appelée le Lapin bossu, endroit hospitalier si obscur et si écarté que Samuel se crut en sûreté en cherchant dans ses sombres murs le repos et quelque nourriture. Il y avait une enseigne encadrée et vitrée, portant ces mots : « Bons lits, » accrochée derrière le carreau de la fenêtre, lits pour lesquels l’aubergiste du Lapin bossu avait l’habitude de demander et de recevoir des prix fabuleux pendant la grande semaine du Saint-Léger. Mais pour le moment, il paraissait qu’il y avait assez peu à faire dans la modeste taverne, et le capitaine Prodder entra hardiment, demanda au comptoir une côtelette, une pinte d’ale, un verre de rhum et d’eau pour prendre après son repas, et retint pour lui un des bons lits. L’aubergiste, qui était un gros homme, frottait son dos contre le comptoir, tout en lisant les nouvelles des courses dans le Manchester Guardian, et ce fut la maîtresse de l’auberge qui prit les ordres de Prodder, et lui montra le chemin pour entrer dans une salle affreusement aménagée, qui était beaucoup plus basse que le seuil de la maison, et dans laquelle le visiteur inexpérimenté risquait de se précipiter, la tête la première, comme dans un puits ou dans un trou. Il y avait dans cette salle plusieurs petites tables en acajou, ornées d’arabesques