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AURORA FLOYD

en or qu’en argent, une somme qui montait à plus de deux années de ses gages ordinaires.

Il fit quelques pas dans l’avenue, et, se retournant, il agita le poing dans la direction de la maison qu’il laissait derrière lui.

— Vous êtes une femme de bel esprit, c’est certain, madame Mellish, — murmura-t-il ; — mais ne me donnez jamais l’occasion de vous faire du mal, ou par Dieu, tout idiot que je suis, je le ferai ! On croit que je ne suis bon à rien, peut-être. Attendez un peu.

Il retira de nouveau son argent de sa poche, et le compta encore une fois, en marchant lentement vers les grilles du Park.

On verra, d’après ce que nous venons d’exposer, qu’Aurora avait deux ennemis, l’un hors de son agréable demeure, et l’autre dans l’intérieur ; l’un nourrissant sans cesse le mécontentement et la haine dans l’enceinte sacrée du foyer domestique, l’autre complotant la ruine et la vengeance hors des murs de cette citadelle.


CHAPITRE XIII

Les courses du printemps.

Dans les premiers jours du printemps, Lucy vint rendre visite à sa cousine ; le bonheur qui régnait à Mellish Park fut pour elle un sujet d’étonnement.

La pauvre Lucy avait compté trouver Aurora, dans ce ménage du comté d’York, estimée un peu mieux que les chiens et un peu plus que les chevaux ; aussi fut-elle énormément surprise de voir sa cousine exerçant le despotisme d’une souveraine capricieuse, dominer sans conteste ni contrôle sur toutes les créatures, bipèdes ou quadrupèdes,