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AURORA FLOYD

min de fer du Nord, ne laissant que la cendre de son feu derrière lui.

Il n’était que naturel de supposer que Mellish se serait rendu tout droit à sa maison de campagne, où il avait tant à faire : inscription de poulains pour les courses prochaines, conditions à régler avec des entraîneurs et des garçons d’écurie, la rédaction d’un plan de nouveau galop et sa mise à exécution, et un assortiment de chevaux de course attendant l’œil du maître. Mais il n’en fit rien ; au lieu d’aller de la station du chemin de fer de Douvres au grand hôtel du Nord, d’avaler à la hâte son dîner, et de partir pour Doncastre par le train express, Mellish se fit conduire en voiture à la taverne de Gloucester, où il s’installa, dans l’intention, dit-il, de voir l’exposition de bestiaux. Il eut la malheureuse fantaisie de monter dans un cab, rôda de tous côtés pendant l’espace d’un quart d’heure, examinant tristement les parcs, puis il s’enfuit précipitamment pour éviter les fermiers du comté d’York qui lui prodiguèrent de cordiales salutations. Le lendemain matin il quitta la taverne de Gloucester, et se fit conduire tout droit à Beckenham. Floyd, qui ne savait rien de la déclaration du jeune habitant du comté d’York et du refus qu’il avait éprouvé, l’avait de tout cœur invité à revenir à Felden. Pourquoi n’irait-il pas ? Seulement pour rendre une visite du matin au banquier hospitalier ; non pas pour voir Aurora ; seulement pour respirer quelques bonnes bouffées de l’air qu’elle respirait, avant de s’en retourner dans sa province.

Il va sans dire qu’il ne savait rien du bonheur de Bulstrode ; et c’avait été une des principales consolations qu’il eût emportées dans son exil, que de se rappeler que ce gentleman s’était embarqué sur le même navire et avait fait naufrage avec lui.

Il fut introduit dans la salle de billard, où il trouva Aurora assise à une petite table près du feu, dessinant au crayon la copie d’une gravure d’un tableau de Rosa Bonheur, tandis que Talbot était près d’elle, occupé à lui tailler ses crayons.